
Pendant longtemps, le concubinage n’a pas eu de statut dans le code civil. On prête d’ailleurs à Bonaparte, premier consul, qui fut à l’initiative du code et promulgua celui-ci, la phrase suivante : « Les concubins se passent de la loi, la loi se désintéresse d’eux. »
C’est seulement en 1999 que le législateur l’a qualifié d’« union de fait », par opposition aux unions imposant un cadre juridique que constituaient le mariage et le tout nouveau pacte civil de solidarité (pacs).
Puisque les concubins n’ont pas les devoirs des personnes mariées ou pacsées, ils n’en ont pas, non plus, les droits. Ils ne peuvent pas, notamment, se prévaloir d’une disposition sur la prescription destinée à préserver la paix des ménages. C’est ce que rappelle l’affaire suivante.
En août 2019, M. X et Mme Y, concubins depuis plus de vingt ans, se séparent, après avoir élevé deux enfants. Ils ne s’entendent pas sur le sort du logement familial, acheté en indivision par moitié, mais financé presque exclusivement par M. X. Ce dernier a non seulement fait deux apports de 30 000 euros, en retirant de l’argent de sa caisse de retraite suisse – qu’il doit rembourser –, mais aussi payé la plupart des échéances des emprunts.
« Impossibilité morale »
Lorsque, le 6 mai 2021, un juge ordonne l’ouverture des opérations de liquidation et de partage, il revendique une créance sur l’indivision. Mme Y lui oppose la prescription de son action, de cinq ans à compter du jour où il se savait créancier, c’est-à-dire où il a payé (article 2224 du code civil).
M. X réplique que la prescription « ne court pas ou est suspendue » pendant la durée de la vie commune : ce principe, prévu par l’article 2236 du code civil, est destiné à éviter que les conjoints ou les partenaires agissent l’un contre l’autre, par simple crainte de la prescription. C’est seulement quand le divorce a acquis force de chose jugée ou que la dissolution du pacs a été enregistrée que la prescription commence à courir. Mais l’article 2236 ne s’applique pas aux concubins.
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