Lorsque le contrôle d’une grande banque est en jeu, la politique n’est jamais loin, surtout quand le prétendant est étranger. L’attitude du gouvernement d’Olaf Scholz à l’irruption spectaculaire de la banque italienne UniCredit au capital de l’allemande Commerzbank est donc scrutée de près. Or, selon la presse allemande, l’opération a pris Berlin de cours.
C’est pourtant le gouvernement qui avait décidé de mettre en vente, début septembre, une partie de la participation de l’Etat, premier actionnaire de Commerzbank depuis son sauvetage par l’argent public au lendemain de la crise financière. Mais il n’avait visiblement pas anticipé que l’opération inciterait UniCredit à passer à l’offensive : outre les 4,5 % cédés par l’Etat, la banque italienne a acheté sur les marchés une participation équivalente.
Avec 9 % du capital, l’établissement financier italien est ainsi devenu du jour au lendemain un actionnaire incontournable de la banque de Francfort, numéro deux du marché allemand. Et son patron, Andrea Orcel, qui a passé vingt ans dans la division de fusions et acquisitions de la banque d’investissement américaine Merrill Lynch, n’exclut aucune hypothèse pour la suite. « Un rapprochement des deux banques pourrait entraîner une valeur ajoutée considérable pour toutes les parties prenantes et créerait un concurrent nettement plus fort sur le marché bancaire allemand », a-t-il déclaré au quotidien Handelsblatt, lundi 16 septembre.
Un pas vers un « vrai marché intérieur bancaire »
Un mariage donnerait en effet naissance à un groupe pesant plus de 78 milliards d’euros en Bourse, une capitalisation supérieure à celle de BNP Paribas, premier établissement bancaire de la zone euro par la taille de bilan.
La banque italienne devenue sous la direction de M. Orcel, l’un des acteurs européens les plus rentables et les plus généreux avec ses actionnaires, a déjà racheté en 2005 l’allemande HypoVereinsBank (HVB), et affichait depuis longtemps son intention de se renforcer sur le premier marché d’Europe.
De son côté, Commerzbank entendait bien préserver son indépendance après cent cinquante-quatre ans d’existence et des années de restructurations, en misant sur sa rentabilité retrouvée et sa spécialisation dans le financement des entreprises de taille intermédiaire.
Pour arriver à ses fins, M. Orcel aura fort à faire pour convaincre la direction de sa cible et le gouvernement Scholz, sans oublier les syndicats, qui n’ont pas tardé à exprimer leur opposition.
Dans la presse, les spéculations vont bon train sur la meilleure manière de réagir. Faut-il préserver l’indépendance de Commerzbank ou voir dans le projet d’UniCredit un progrès vers la consolidation du marché bancaire allemand, encore très morcelé ? Le débat, au point mort depuis des années outre-Rhin, est relancé.
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