
Les Etats-Unis et l’Union européenne (UE) sont parvenus à un accord commercial prévoyant des droits de douane de 15 % sur les exportations européennes, a annoncé, dimanche 27 juillet, le président Donald Trump, à l’issue d’une rencontre avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, à Turnberry, en Ecosse.
L’UE s’est engagée à 750 milliards de dollars (638 milliards d’euros) d’achats d’énergie et à 600 milliards d’investissements supplémentaires aux Etats-Unis, selon le président américain, qui s’est entretenu avec la dirigeante européenne pendant une heure. « Nous avons trouvé un accord », annonce le dirigeant républicain, le qualifiant de « plus grand » jamais conclu en matière de commerce, et en y voyant une promesse « d’unité et d’amitié ». La patronne de l’exécutif européen salue, elle, un « bon accord », qui apportera de la « stabilité ».
Le républicain de 79 ans, lancé dans une vaste offensive protectionniste, s’était donné jusqu’au 1ᵉʳ août avant d’assommer les produits européens entrant aux Etats-Unis de droits de douane. Il a accueilli peu avant 17 heures (18 heures, heure de Paris) la dirigeante européenne dans le luxueux complexe de golf appartenant à sa famille sur la côte ouest de l’Ecosse.
Tous deux avaient évalué les chances d’un accord à « 50-50 », en s’exprimant devant des journalistes avant leur entretien. Le dirigeant américain avait estimé qu’il restait « quelques problèmes » à régler. Si un accord était trouvé « ce serait le plus important » jamais conclu pour les deux parties, avait-il encore affirmé.
Un accord qui « évite une escalade inutile »
Les deux puissances économiques ont décidé de lever réciproquement leurs droits de douane « sur un certain nombre de produits stratégiques », dont les équipements aéronautiques, « certains produits chimiques, des équipements pour semi-conducteurs, certains produits agricoles et des matières premières critiques », a précisé la présidente de la Commission européenne devant la presse en Ecosse.
Les détails de l’accord doivent encore être réglés « dans les prochaines semaines », selon la dirigeante européenne. « 15 %, ce n’est pas négligeable, mais c’est le mieux qu’on pouvait obtenir », a-t-elle plaidé.
Cela permet d’« éviter une escalade inutile dans les relations commerciales transatlantiques », a déclaré le chancelier allemand, Friedrich Merz. « Nous avons ainsi pu préserver nos intérêts fondamentaux, même si j’aurais souhaité davantage d’allègements dans le commerce transatlantique », a précisé dans un communiqué le chancelier, alors que les Etats-Unis sont le premier partenaire commercial de l’Allemagne.
Des « répercussions considérables »
L’industrie chimique allemande, dont les Etats-Unis sont un marché d’exportation clé, a jugé dimanche « trop élevés » les droits de douane de 15 %, même si l’accord a permis « d’éviter » des surtaxes encore plus élevées. « Quand on s’attend à un ouragan, on se réjouit d’une simple tempête. Une nouvelle escalade a pu être évitée. Néanmoins, le prix à payer est élevé pour les deux parties », a réagi dans un communiqué la fédération VCI de la chimie, représentant des géants industriels comme Bayer ou BASF.
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Les droits de douane convenus dans l’accord auront « des répercussions négatives considérables sur l’industrie allemande », a réagi la fédération de ce secteur clé pour l’économie de l’Allemagne. « Cet accord est un compromis insuffisant et envoie un signal fatal à l’économie étroitement interdépendante des deux côtés de l’Atlantique », a jugé dans un communiqué la Fédération allemande de l’industrie (BDI), pour qui « l’UE accepte des droits de douane douloureux » qui auront « des répercussions négatives considérables sur l’industrie allemande, très orientée vers l’exportation ».
« L’accord entre l’UE et les Etats-Unis met un terme à une phase d’incertitude et évite une guerre commerciale. Nous examinerons tous les détails », a écrit sur le réseau social X Antonio Tajani, chef de la diplomatie italienne. Même son de cloche chez la cheffe du gouvernement, Giorgia Meloni, en visite en Ethiopie pour un sommet de l’ONU sur la sécurité alimentaire. « Je considère positif qu’il y ait un accord mais tant que je ne vois pas les détails, je ne peux pas formuler un jugement meilleur », a-t-elle dit à Addis Abeba, citée par les médias italiens.
Un accord soumis aux Vingt-Sept
Le deal devra être validé par les Etats membres de l’UE. Leurs ambassadeurs, en déplacement au Groenland, ont été informés dimanche matin des dernières tractations, et devront à nouveau se concerter pour le valider.
L’accord de Turnberry confirme que les échanges transatlantiques sont entrés dans une nouvelle ère, celle d’un protectionnisme américain décomplexé. Jusqu’au retour au pouvoir de Donald Trump, les droits de douane étaient marqués par un niveau de droits de douane américains bien moins élevés, de 4,8 % en moyenne.
Dans les faits, le taux effectif appliqué par les Etats-Unis aux marchandises européennes se monte donc déjà actuellement à près de 15 %, si l’on additionne la surtaxe de 10 % d’ores et déjà appliquée par le gouvernement américain et le taux de 4,8 % préexistant. L’UE est actuellement soumise à une taxe de 25 % sur les voitures, de 50 % sur l’acier et l’aluminium, ainsi qu’à des droits de douane généraux de 10 %.
Le spectre de l’affaire Epstein
Le milliardaire new-yorkais, qui s’est toujours joué des scandales et des poursuites pénales, peine, dans le même temps, à se dépêtrer de l’affaire Jeffrey Epstein. Il est accusé de manquer de transparence sur les relations qu’il entretenait avec ce riche financier, mort en prison avant d’être jugé pour crimes sexuels, procès qui s’annonçait retentissant.
En annonçant un accord avec l’UE, dans la foulée de ceux conclus ces derniers jours avec le Japon, le Vietnam, les Philippines et l’Indonésie, Donald Trump essaie-t-il de faire diversion ? Un journaliste lui a posé la question dimanche. « C’est une blague n’est-ce pas ? Cela n’a rien à voir. Il n’y a que vous pour penser ça, en ce jour qui est un bon jour pour l’économie européenne et l’économie américaine », a rétorqué le président américain.
Lundi, c’est avec la Chine que des négociateurs américains s’efforceront, au cours d’une rencontre à Stockholm, d’éviter une reprise de l’escalade commerciale.