« Le temps laissera plus de place aux Jeux qu’à la période d’instabilité politique. Paris 2024, c’est unique »

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Dans les tribunes de l’Arena Champ-de-Mars, avant la demi-finale de cécifoot des Jeux paralympiques entre l'équipe de France et la Colombie, le 5 septembre 2024, à Paris.

Yvan Gastaut est historien, maître de conférences en histoire contemporaine à l’université Côte d’Azur et commissaire de l’exposition « Olympisme, une histoire du monde », qui s’est tenue au palais de la Porte-Dorée, à Paris, du 26 avril au 8 septembre.

Outre la beauté de Paris, les cérémonies d’ouverture des Jeux olympiques et paralympiques ont mis à l’honneur la mixité de la société française. Pensez-vous, que cette vision, dans toutes ses composantes (apports de l’immigration, diversités des genres, des corps), puisse s’inscrire dans notre mémoire collective ?

Depuis que l’on sait que Paris doit organiser ces deux manifestations sportives, une attention particulière a été portée aux cérémonies d’ouverture et de clôture, des rendez-vous susceptibles de marquer l’histoire de France. S’il y a un mot à retenir de cette dimension patrimoniale, c’est cette impulsion donnée à la visibilité des invisibles. Et celle-ci va sans aucun doute s’inscrire dans les mémoires, qu’elle soit universelle, nationale ou encore individuelle et familiale. En rappelant qu’une société est le résultat d’une composante diverse et variée, la France a endossé, comme souvent au cours de son histoire, le rôle de balise pour la suite des évolutions sociétales.

La chanteuse Aya Nakamura qui danse avec la garde républicaine, la para cycliste Marie Patouillet dédiant sa victoire à sa femme, Léon Marchand multimédaillé… Quelles images s’inscriront, selon vous, dans la durée ?

Ce qui reste souvent, ce sont les réactions, en France et à l’étranger, quant à l’image symbolique proposée. En effet, il y a fort à parier qu’on se souviendra d’Aya Nakamura qui danse avec la garde républicaine car c’est une sorte d’autodérision, une manière de casser les codes typiquement française, mais aussi porteuse d’un message très fort. De même avec la mise en scène des corps de personnes en situation de handicap lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux paralympiques. Encore une fois, sans être naïf et angélique, ce ne sont que des impulsions, des tendances, mais qui, à mon sens, vont rester. Le sport est le seul domaine capable de proposer cela. Evidemment, les parcours de tel ou tel athlète sont aussi de nature à s’inscrire dans la durée.

Mais la mémoire de cette mixité ne risque-t-elle pas d’être éphémère ? Que reste-t-il de l’équipe de France « black-blanc-beur » de 1998, si ce n’est leur victoire lors de la Coupe du monde de football ?

Il faut assumer que le sport ne peut pas prétendre à une fonction sociale effective. En revanche, cette dimension patrimoniale joue en termes de ressenti, de symbolique. Le Mondial 1998 reste une histoire importante pour la France, mais de quoi se souvient-on ? Même si le symbole n’a pas eu d’effets, ou très peu dans la société, l’évènement sportif est resté dans les mémoires et a eu un impact, sans doute difficile à mesurer. Mais si l’on demande aux Français ce qu’ils ont retenu de la fin du siècle dernier, la réponse est souvent, l’élection de François Mitterrand, en mai 1981, et la victoire des Bleus, en 1998.

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