vendredi, septembre 20FRANCE

« Le jour où mon fils est mort, j’ai ressenti presque plus de rage envers le gouvernement des Etats-Unis qu’envers ses assassins »

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Il y a un peu plus de dix ans, le 19 août 2014, mon fils le journaliste James Foley a été sauvagement assassiné par l’organisation Etat islamique (EI), alors qu’il se trouvait en Syrie. Les images de sa décapitation ont déferlé sur Internet, avec une violence qui a pétrifié les Américains. Sa combinaison orange est devenue emblématique. Et, comme pour tant d’autres personnes enlevées et prises en otage ces dernières années, notre gouvernement a considéré sa mort comme un simple dommage collatéral. Moi, j’ai refusé de voir les choses comme cela.

Au cours des dix années qui se sont écoulées depuis la perte de Jim, j’ai appris que de la douleur peuvent naître l’espoir et le changement. Je me suis efforcée de porter le message de sa vie au monde. Les responsables politiques et la population commencent à l’entendre. Même ses assassins l’ont entendu.

C’est un message que, j’en suis convaincue, nous devons tous continuer d’écouter : pour être moral, il faut avoir du courage, et il faut dire les choses tout haut. Etre Américain n’est pas un crime. Etre journaliste n’est pas un crime. Avoir foi en la possibilité d’un changement non plus n’est pas un crime – nous pouvons nous faire écouter de nos responsables politiques, nous pouvons ramener chez nous les êtres qui nous sont chers. Même en ces temps de fracture criante, l’espoir est permis.

Le jour où mon fils est mort, j’ai ressenti presque plus de rage envers le gouvernement américain qu’envers ses assassins. Des membres du Conseil de sécurité nationale et d’autres dirigeants avaient menacé de poursuites notre famille, comme plusieurs autres, si nous avions ne serait-ce que tenté de réunir la rançon qui aurait permis d’acheter sa liberté. J’ai été ahurie de voir les gouvernements de France, d’Espagne, d’Italie négocier pour sauver la vie de leurs citoyens alors que nos hommes et nos femmes étaient purement et simplement abandonnés à leur sort.

Politique cruelle, obstinée, mal avisée

Jim était allé en Afghanistan, en Libye et en Syrie, pour rendre compte non seulement de la détresse de la population, mais aussi des conditions de vie de nos soldats. Il a été capturé et torturé pour avoir fait son travail de journaliste et pour avoir défendu la démocratie. L’histoire nous enseigne qu’un pays informé est un pays qui peut exiger de ses dirigeants qu’ils fassent leur devoir. Alors que Jim était un citoyen américain, qu’il effectuait son travail, avec le soutien de la population américaine, nous avons reçu très tôt ce message clair, implacable, venu de tout en haut, du bureau Ovale : il n’y aura aucune négociation pour sa libération, jamais. Les Américains, nous a-t-on dit, ne discutent pas avec les terroristes.

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