La mort de Dries van Agt, ancien premier ministre des Pays-Bas

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Dries van Agt, le 8 septembre 1982, aux Pays-Bas.

Il a sans nul doute été l’une des personnalités politiques les plus étonnantes des Pays-Bas et les circonstances de son décès, survenu le 5 février à Nimègue et révélé vendredi 8, ne pouvaient être banales. L’ancien premier ministre Dries van Agt est mort la main dans celle de son épouse, Eugenie Krekelberg, qu’il avait rencontrée à l’université soixante-dix ans plus tôt. Agés tous deux de 93 ans, ils avaient demandé à être euthanasiés ensemble.

Très populaire mais également objet de franches détestations, ce chrétien-démocrate qui dirigea trois gouvernements de décembre 1977 à novembre 1982 cultivait un style souvent en rupture avec celui, longtemps très compassé, d’un milieu politique qu’il semblait ne pas prendre vraiment au sérieux.

Catholique pratiquant, né le 2 février 1931 à Geldrop, dans le Brabant-Septentrional, il cumula les rôles : professeur de droit pénal, avocat, haut fonctionnaire, ministre de la justice, chef de gouvernement et ambassadeur. Alors qu’il n’avait que 52 ans, il quittait la politique active fin 1982 avant de devenir diplomate et d’enseigner les relations internationales au Japon, puis de fonder une ONG, The Rights Forum, dont le but était d’intéresser les Néerlandais et les Européens à la question israélo-palestinienne.

C’est parce que son parti, l’Appel chrétien-démocrate, était, à ses yeux, trop ouvertement pro-israélien qu’il critiqua celui-ci avant de déchirer sa carte de membre en 2021 et d’annoncer qu’il voterait désormais pour la gauche écologiste. En 2010, il s’était aussi fermement opposé à une alliance des chrétiens et des libéraux avec le populiste extrémiste Geert Wilders, qui apporta, pendant deux ans, son soutien au premier gouvernement de Mark Rutte. « C’était un grand homme, je l’admirais », a commenté le dirigeant libéral en apprenant le décès de son prédécesseur, avec lequel il échangeait régulièrement.

« Plus coriace qu’un reptile »

Au fil de sa carrière politique, Dries van Agt aura récolté des avis moins flatteurs. Apprenant sa nomination comme ministre de la justice, au début des années 1970, le doyen de la faculté de droit de Nimègue, aurait lâché un « bon débarras ». Un de ses collègues ministres le décrivait comme « un bavard impulsif » et s’il avait du respect pour l’un de ses principaux rivaux, le social-démocrate Joop den Uyl, celui-ci parlait de son collègue, qui fut son vice-premier ministre de 1973 à 1977, comme d’« un mystique dont on sait ce qui le guide, mais pas dans quelle direction ».

Dries van Agt, qui se dépeignait comme « plus coriace qu’un reptile », aura, il est vrai, souvent brouillé les pistes. Conservateur, il aura dépénalisé la consommation du cannabis, supprimant les peines de prison pour celui qui détenait moins de 30 grammes. Il aura aussi contribué à ce que les Pays-Bas soient le premier pays européen à dépénaliser l’euthanasie et le suicide assisté. Il s’opposait, en revanche, à une loi trop tolérante en matière d’IVG.

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