mercredi, septembre 18FRANCE

« Je réaffirme ici le travail de l’Eglise en France pour que la vérité soit faite »

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Les déclarations du pape au sujet de l’abbé Pierre, au retour d’un voyage de douze jours en Asie du Sud-Est, ont relancé l’émoi dans une France déjà sidérée par les effroyables révélations successives qui ont brisé l’image de celui qui avait été tant de fois désigné « personnalité préférée des Français » ; de celui, surtout, dont la voix et l’exemple avaient transformé le regard sur les personnes en précarité et avaient encouragé tant de Français à s’engager pour des causes aussi importantes que la lutte contre le « mal-logement ».

Comme président de la Conférence des évêques de France, je voudrais partager ici trois convictions et interrogations.

En premier lieu, il est désormais établi que, dès 1955-1957, quelques évêques au moins ont su que l’abbé Pierre avait un comportement grave à l’égard des femmes. Des mesures ont été prises, dont une cure psychiatrique. On peut les juger insuffisantes, on peut regretter qu’elles aient été gardées très confidentielles. Elles représentent cependant une réaction forte au regard des manières de faire de ce temps, dans l’Eglise sans doute, mais aussi dans la société entière.

Un adjoint (socius), notamment, a été imposé à l’abbé Pierre. Il semble que l’abbé Pierre se soit ingénié à tromper cette surveillance. Des questions doivent être traitées sérieusement : ce socius a-t-il fait des rapports ? Si oui, à qui ? Qu’y a-t-il dit ? Combien de temps a duré cette mission ? Que s’est-il passé lors du retrait ou de la mort du prêtre ainsi nommé ? Pendant les cinquante années suivantes de vie de l’abbé Pierre, comment l’inquiétude à son propos et les mesures à prendre à son égard ont-elles été transmises ?

C’est pour aider à faire la lumière sur ces questions et sur d’autres que la Conférence des évêques de France, comme je l’ai annoncé jeudi 12 septembre, a décidé de lever le délai de communicabilité des archives qui dépendent d’elle concernant l’abbé Pierre. Je forme aussi respectueusement le vœu que le Vatican se livre à une étude de ses archives et dise ce que le Saint-Siège a su et quand il l’a su.

Je réaffirme ici le travail de l’Eglise en France pour que la vérité soit faite sur les faits d’agressions et de violences sexuelles comme aussi sur les faits d’emprise spirituelle, et pour revoir ses fonctionnements. J’appelle toutes les autres institutions et organisations à en faire autant. Nous devons cela aux personnes victimes.

Les personnes victimes peuvent enfin parler

En deuxième lieu, il est établi aussi désormais que l’on savait, au moins dans certains cercles d’Emmaüs, l’abbé Pierre étant encore vivant, qu’il devait être surveillé parce qu’il était dangereux pour les femmes qui s’approchaient de lui. Or, des biographies nombreuses et fouillées ont été écrites sur l’abbé Pierre et des films ont été réalisés à son propos, de son vivant et après sa mort. Aucune de ces études, aucun de ces films ne laisse apercevoir qu’il se livrait à des agressions sexuelles. Cela doit être questionné.

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