
Aux abords des tombes fraîchement creusées ont été posés les portraits de 26 jeunes Libanais. Ici, deux frères âgés d’une vingtaine d’années. Là, une autre fratrie, tuée le même jour que leurs cousins… Tous appartenaient à une unité territoriale du Hezbollah décimée, fin novembre 2024, alors qu’elle tentait de bloquer l’avancée d’une colonne israélienne. « Tant de destructions, tant de morts, est-ce que ça en valait vraiment la peine ? », s’interroge Hassan, dont le regard se perd au-delà du cimetière, en direction du village de Houla, sur la ligne de démarcation entre le Liban sud dévasté par la guerre et le nord d’Israël.
Les combattants avaient été enterrés, le 6 décembre 2024, à la faveur d’un cessez-le-feu précaire qui actait, de facto, la reddition du Hezbollah. Le mouvement chiite, créé en 1982 avec l’aide de gardiens de la révolution iraniens, est décapité. Son chef, Hassan Nasrallah, avait été tué le 27 septembre 2024, dans une frappe israélienne sur son quartier général ultrasécurisé de la banlieue de Beyrouth. La seule des milices issues de la guerre civile libanaise à n’avoir pas été démilitarisée en 1990, vénérée comme le « parti de la résistance » à Israël, mais aussi crainte et parfois détestée au fur et à mesure qu’elle avait étendu son emprise dans le pays, est sommée de désarmer. Une perspective encore inimaginable quelques mois auparavant.
L’offensive dévastatrice de Tel-Aviv contre le Hezbollah, qui a également pris les Iraniens de court, impuissants à le soutenir par crainte d’une riposte israélienne sur leur sol, a même instillé le doute chez les sympathisants du Parti de Dieu : et si Téhéran les avait sacrifiés pour s’éviter une guerre ouverte avec Israël ? L’« axe de la résistance », cette toile composée de mouvements armés, patiemment tissée par la République islamique de la péninsule Arabique jusqu’aux rives du Levant, était en réalité déjà affaibli. Mais la mise à genoux du Hezbollah, son pilier le plus ancien et le plus puissant à l’extérieur de l’Iran, a lancé le compte à rebours de l’anéantissement de sa stratégie de défense et d’expansion régionale. Plus isolé que jamais, Téhéran est, depuis le 13 juin, sous le feu d’Israël, déterminé à détruire méthodiquement les installations nucléaires et l’appareil militaro-sécuritaire iraniens.
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