Dans une fabrique de nanotubes de carbone pour le calcul quantique

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Dépôt de nanotubes de carbone sur une puce électronique afin de réaliser un qubit quantique, la spécialité de la start-up C12.

En plein Paris, une usine d’un nouveau genre tourne à plein régime depuis quelques mois : une fabrique de bits quantiques. Ces curieux objets sont le cœur d’une rupture technologique explorée par les plus grandes entreprises de l’informatique (IBM, Google, Microsoft, Amazon…), qui cherchent à construire des calculateurs d’un nouveau genre, des ordinateurs quantiques. Ces derniers réaliseront des calculs infaisables aujourd’hui, pour casser des codes secrets, prédire les propriétés de matériaux, de médicaments, de catalyseurs… Ou simplement feront gagner du temps ou de l’énergie. La start-up C12 Quantum Electronics, créée en 2020, s’est elle aussi lancée sur ce créneau déjà occupé, rien qu’en France, par une poignée d’autres entreprises : Alice & Bob, Pasqal, Quandela ou Quobly.

Dans ses locaux du 5arrondissement, au sommet de la montagne Sainte-Geneviève, la quarantaine d’employés de dix-huit nationalités s’activent. « Nous n’avons pas choisi ce lieu au hasard. Il est près du laboratoire de l’Ecole normale supérieure où les idées-clés ont été découvertes. Mais surtout il y a peu de vibrations et de perturbations électromagnétiques », souligne Pierre Desjardins, PDG de l’entreprise, frère jumeau de son cofondateur, Matthieu, le directeur technique. Les bits quantiques ou qubits sont en effet des objets microscopiques fragiles, qu’il convient de déranger le moins possible afin que le carrosse ne redevienne citrouille. Et que les propriétés quantiques, à la base de la réussite des futures machines, ne disparaissent.

Fabriquer ces qubits implique plusieurs étapes. Un escalier en colimaçon amène à la première, au premier sous-sol, dans un espace vitré. A l’intérieur, dans un four chauffant à 900 degrés, du méthane est introduit, ainsi que des pièces métalliques en forme de peigne, dont les dents sont imprégnées d’un catalyseur. Grâce à lui, sous l’effet de la chaleur, le gaz condense, créant un pont de carbone en forme de tube reliant deux dents : 30 micromètres de long pour 2 à 3 nanomètres de diamètre, en une heure de croissance environ. Le qubit émerge.

Capable d’être dans deux états simultanément

Pierre Desjardins souligne un détail essentiel. « Le méthane que nous utilisons pour apporter du carbone est particulier. Il ne contient que l’isotope dit “12” du carbone, d’où le nom de l’entreprise. Le méthane naturel contient 98 % de carbone 12. Nous 99,99 %. » Une telle pureté permet d’éviter les perturbations magnétiques apportées par les autres isotopes, qui possèdent plus ou moins de neutrons.

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