

Jameson (qui utilise un prénom d’emprunt par crainte de représailles) s’apprête à parler, mais sa respiration se coupe, il s’effondre, son front posé contre la table. La chaleur qui étouffe Montréal, en ce début juillet, n’en est pas la cause : « C’est le stress, je suis épuisé », raconte-t-il, essoufflé. Le trentenaire est à bout. Du New Jersey au canapé du centre d’hébergement La Traverse, dans le nord de Montréal, il vient d’accomplir un périple de 700 kilomètres.
Arrivé la semaine précédente au Québec, après avoir roulé longtemps, puis traversé à pied une forêt de la Nouvelle-Angleterre, il a rejoint la trentaine de demandeurs d’asile hébergés ici, dans le presbytère d’une église de la communauté haïtienne. « La forêt, c’était dur. Et je voyais des voitures de police au loin, j’avais tout le temps peur », détaille-t-il. Mais il ne voulait plus rester un jour de plus aux Etats-Unis, où il vivait depuis un an, par crainte d’être renvoyé rapidement en Haïti, où il a déjà subi des violences, dont il garde un tibia cassé. « Il fallait que je parte au plus vite », soupire Jameson, l’œil vif et la voix saccadée.
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