
En quête de nourriture, des milliers de personnes tentent chaque jour, désespérément, d’approcher l’un des quatre centres de distribution alimentaire ouvert, avec le soutien d’Israël et des Etats-Unis, par la controversée Gaza Humanitarian Foundation (GHF) dans l’enclave palestinienne depuis fin mai. Et chaque jour, ou presque, des Gazaouis y perdent la vie. En moins d’un mois, dix-neuf incidents impliquant des tirs de l’armée israélienne ont été recensés, provoquant la mort de 549 Palestiniens et en blessant 4 000 autres selon un bilan établi le 24 juin par le ministère de la santé du Hamas et corroboré par l’ONU.
Dans un long article paru le 27 juin, le journal israélien Haaretz a recueilli le témoignage accablant de soldats et officiers israéliens chargés de la sécurité de ces centres. Et tous, sous le couvert de l’anonymat, décrivent des scènes passibles de crimes de guerre. « Là où j’étais posté, entre une et cinq personnes étaient tuées chaque jour, raconte l’un d’eux. Elles sont traitées comme des forces hostiles : pas de mesures de contrôle des foules, pas de gaz lacrymogènes ; juste des tirs à balles réelles avec tout ce qu’il est possible d’imaginer, mitrailleuses lourdes, lance-grenades, mortiers. Puis, une fois le centre ouvert, les tirs cessent et [les Gazaouis] savent qu’ils peuvent approcher. Notre moyen de communication, c’est la fusillade. » Une stratégie appelée, selon lui, dans sa zone de service, « Poisson salé », équivalent israélien du jeu « Un, deux, trois, soleil ».
Souvent désorientée par les consignes de sécurité contradictoire qu’on lui donne aux abords de ces centres (trois se trouvent près Rafah dans le Sud et un autre au centre, à proximité du corridor de Netzarim), la foule s’y précipite bien avant leur ouverture – parfois même la nuit – sans toujours discerner les corridors attribués. « Travailler avec une population civile alors que le seul moyen d’interaction est d’ouvrir le feu est pour le moins très problématique, déplore un officier. Il n’est ni éthique ni moralement acceptable que des personnes soient obligées d’atteindre, ou non, une [zone humanitaire] sous le feu des chars, des snipers et des obus de mortier. »
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