

Aucun harcèlement n’a été démontré « à ce stade » dans l’enquête sur la mort de l’adolescent de 15 ans retrouvé mardi dans les toilettes de son lycée, dont les causes restent inconnues, a déclaré jeudi 11 avril le procureur de la République de Reims, François Schneider. « A ce stade (…) aucun fait de harcèlement à son endroit n’a pu être démontré, contrairement à ce qui peut se raconter très abondamment sur les réseaux sociaux et qui se répand chez tous les élèves », a affirmé M. Schneider en conférence de presse.
« Il n’y a pour l’instant aucun élément objectif permettant de penser qu’il a voulu attenter à sa vie, contrairement, également, à ce qui se répand sur les réseaux sociaux », a-t-il ajouté. Mais « l’hypothèse n’est bien entendu pas exclue ».
Selon son récit, ce jeune homme scolarisé en seconde au lycée Saint-Jean-Baptiste-de-La-Salle a demandé à se rendre aux toilettes vers 18 h 45. Ne le voyant pas revenir, la responsable de l’internat est allée le voir et l’a entendu tousser et vomir. Elle a fini par ouvrir la porte des toilettes et l’a retrouvé en arrêt cardio-respiratoire, selon le procureur.
Les élèves n’ont pas été entendus, mais le personnel décrit, selon lui, « un jeune homme sans histoire qui était calme et bon élève » et « très bien le 9 avril, avant le drame ».
« Il a pu faire l’objet de quelques moqueries sporadiques, qui ne peuvent pas être qualifiées de harcèlement. En tout cas, ce n’est absolument pas ce qui ressort de l’enquête », a insisté M. Schneider. L’autopsie jeudi matin n’a pas permis de déterminer les causes de la mort, mais a éliminé une intervention extérieure, a-t-il détaillé, disant attendre les analyses de sang et anatomopathologiques.
Le procureur s’est refusé à commenter la « vie personnelle » de l’adolescent, qui « n’a aucun lien en l’état avec son décès », allusion à d’éventuelles discriminations liées à son orientation sexuelle rapportées par des élèves.
La ministre de l’éducation nationale, Nicole Belloubet, avait réclamé mercredi sur X que « la lumière » soit faite « sur cette tragédie ».
« Un poids énorme »
La direction de la fondation de La Salle, qui gère des établissements catholiques dans toute la France, s’est dite « atterrée » par cette mort. Elle a refusé de se prononcer sur un éventuel harcèlement, évoqué par trois élèves du lycée auprès de journalistes de l’AFP. Le procureur de la République de Reims a souligné, de son côté, que le contexte de la mort de l’adolescent n’était « absolument pas clairement défini ».
Le Monde Ateliers
Cours en ligne, cours du soir, ateliers : développez vos compétences
Découvrir
Selon une élève de terminale de 18 ans, le jeune garçon avait été « discriminé sur son orientation sexuelle », ce dont il se serait plaint auprès de surveillants à plusieurs reprises, ainsi qu’auprès de la vie scolaire. « Se faire charrier, insulter à cause de ça, c’était un poids énorme », a confié un autre élève. Il rapporte que l’adolescent avait été changé de chambre parce que « ça se passait mal à l’internat », sans amélioration de la situation. Un troisième, son voisin de chambre, assure qu’il a subi des « moqueries, des insultes dans le dos », et que le personnel était « au courant ».
C’était « un jeune qui était en recherche » sur lui-même, « qui se questionnait, comme beaucoup de jeunes de son âge », a expliqué Didier Tilly, le directeur du groupement scolaire dont dépend le lycée Saint-Jean-Baptiste-de-La-Salle.
Bénévole depuis la rentrée de septembre 2023 au sein de Radio Jeunes Reims, une radio associative basée dans le lycée mais indépendante de l’établissement, il « venait chez nous prendre un peu de liberté », selon James Jouffroy, responsable de la station. « Passionné d’audiovisuel », il trouvait à la radio « un moyen de se libérer de sa timidité », ajoute le responsable associatif, qui le voyait toujours souriant dans les couloirs du lycée, « toujours avec des amis, aussi bien des garçons que des filles ».
Un bouquet de roses blanches a été déposé devant l’entrée de l’établissement, resté ouvert mercredi. Une cellule psychologique a été mise en place en accord avec le diocèse.
Franck Leroy, président de la région Grand-Est, a fait part sur X de son « émotion » devant un « drame bouleversant ». Le directeur de cabinet du recteur de l’académie de Reims « s’est rendu dans l’établissement afin d’apporter son soutien », a déclaré le rectorat, sans étayer les soupçons de harcèlement.
Le harcèlement scolaire a été au cœur de l’actualité en 2023, après une série de cas dramatiques, dont le suicide de Lindsay, 13 ans, en mai dans le Pas-de-Calais, et celui de Nicolas, 15 ans, en septembre dans les Yvelines.
Le gouvernement a réagi fin septembre 2023 en annonçant l’instauration de « cours d’empathie » à partir de septembre, la confiscation des téléphones des auteurs de cyberharcèlement grave, et la saisine « systématique » du procureur de la République en cas de signalement.