En Turquie, destitution de trois maires prokurdes accusés de « terrorisme »

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Des manifestants se rassemblent contre les administrateurs à côté d’une banderole qui dit : « La volonté du peuple ne peut pas être usurpée. Nous ne laisserons pas les administrateurs », lors d’une manifestation à Diyarbakir, en Turquie, le 4 novembre 2024.

L’étau se resserre autour de l’opposition turque, menacée par de nouvelles arrestations de ses élus, avec le risque d’embrasement dans différentes villes du pays. Cinq jours après avoir démis et appréhendé un maire d’arrondissement d’Istanbul, Ahmet Özer, un universitaire reconnu et proche du maire CHP (Parti républicain du peuple, centre gauche, nationaliste) de la ville, Ekrem Imamoglu, la justice turque a destitué, lundi 4 novembre, au petit matin, trois édiles issus du Parti de l’égalité des peuples et de la démocratie DEM (ex-HDP, gauche prokurde) du sud-est turc. Tous les quatre sont accusés du même crime de « terrorisme » et de liens avec les combattants du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), ce que démentent formellement les quatre maires et leurs formations politiques.

A l’instar d’Istanbul, les trois élus kurdes – Ahmet Türk à Mardin, Gülistan Sonük à Batman et Mehmet Karayilan, maire de la petite localité de Halfeti – ont été immédiatement remplacés dans la journée par des gouverneurs nommés par l’Etat, des kayyum en turc, a annoncé le ministère de l’intérieur. Plusieurs échauffourées avec les forces de l’ordre ont d’ores et déjà eu lieu à la mi-journée lundi.

La vitesse et la précipitation dans lesquelles ont été menées ces destitutions sont clairement perçues par les analystes et politistes indépendants comme un nouveau signe du durcissement de la politique du gouvernement du président Recep Tayyip Erdogan à l’égard d’une opposition ragaillardie après sa large victoire aux municipales du 31 mars.

Elles soulèvent également une série de questions sur les perspectives et la sincérité de l’appel pour la paix lancé par la coalition gouvernementale, le 22 octobre, et visant à mettre fin à un conflit de quarante ans entre le PKK et l’Etat.

« Nous ne reculerons pas »

Dès l’annonce de l’arrivée d’un administrateur imposé par le pouvoir central à Mardin, la police a encerclé le bâtiment de la municipalité. Le nouveau gouverneur a immédiatement annoncé une interdiction de réunion, de manifestation et de déclaration à la presse pendant dix jours. Dans sa première réaction sur les réseaux sociaux, le maire Ahmet Türk, figure populaire et historique du mouvement kurde, âgé de 82 ans, a déclaré : « Nous ne reculerons pas dans la lutte pour la démocratie, la paix et la liberté. Nous ne permettrons pas que la volonté du peuple soit confisquée. Que cela se sache ! » C’est la troisième fois qu’il est ainsi destitué par un kayyum sous un gouvernement du Parti de la justice et du développement (AKP).

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